Moïse, le messager de l’Eternel, aurait-t-il composé un chant où s’exprimerait la joie d’Israël devant l’anéantissement de l’armée égyptienne? Comment concilier ce cantique avec cette parole de sagesse universelle:
ש«בִּנְפֹל אויביך (אוֹיִבְךָ) אַל-תִּשְׂמָח וּבִכָּשְׁלוֹ אַל-יָגֵל לִבֶּךָ» (משלי כד, יז).ש
«Lorsque ton ennemi tombe, ne te réjouis point; s’il succombe, que ton cœur ne jubile pas!» (Proverbes 24: 17)?
Une lecture attentive permet d’observer que, loin d’exprimer un sentiment de réjouissance après la mort tragique des troupes de Pharaon[2], le Cantique de la Mer des Joncs (יַם-סוּף/YaM SOuF) met l’accent sur la toute-puissance de l’Eternel dénommé «Homme de guerre» (Ex. 15: 3). L’Eternel prend soin de ses créatures humiliées. Il agit en leur faveur, juge ces dernières avec équité et ne manque point de châtier les bourreaux d’Israël avec rigueur! La traversée miraculeuse de la Mer marque le glas de l’Empire pharaonique qui, ébranlé dans ses propres fondements religieux, finira englouti dans les eaux troubles de l’Histoire humaine:ש
אָז יָשִׁיר-מֹשֶׁה וּבְנֵי יִשְׂרָאֵל אֶת-הַשִּׁירָה הַזֹּאת לַיהוָה וַיֹּאמְרוּ לֵאמֹר אָשִׁירָה לַיהוָה כִּי-גָאֹה גָּאָה סוּס וְרֹכְבוֹ רָמָה» בַיָּם ב עָזִּי» וְזִמְרָת יָהּ וַיְהִי-לִי לִישׁוּעָה זֶה אֵלִי וְאַנְוֵהוּ אֱלֹהֵי אָבִי וַאֲרֹמְמֶנְהוּ ג יְהוָה אִישׁ מִלְחָמָה יְהוָה שְׁמוֹ» (שמות טז, א-ג).ש
«Alors Moïse et les enfants d’Israël chantèrent l’hymne suivant à l’Éternel. Ils dirent: « Chantons l’Éternel, il est souverainement grand; coursier et cavalier, il les a lancés dans la mer. 2 Il est ma force et ma gloire, l’Éternel! Je lui dois mon salut. Voilà mon Seigneur, je lui rends hommage; le Seigneur de mon père et je le glorifie. L’Éternel est le maître des batailles; Éternel est son nom!» (Exode 15: 1-3)
Si, certes, la source biblique ne manque point de relater l’épisode des Egyptiens engloutis dans les eaux tumultueuses (YaM SOuF), le thème essentiel du Cantique de la Mer (Shirat HaYam) réside en la Révélation de la Gloire divine éclatant aux yeux d’un peuple entier, Israël. Les Sages d’Israël remarquent que, lors de la déchirure du Yam Souf, «la plus simple des servantes eut le mérite de voir ce que même le prophète Ezéchiel fils de Bouzi ne pourra pas voir» (Mekhilta deShira 3: 4-5). Un peuple entier sorti d’Egypte, de la Maison de l’esclavage, jouit au même titre que Moïse au buisson ardent, de la Lumière resplendissante de l’Eternel et, dans un élan d’infinie reconnaissance, entame l’hymne de la Libération. La victoire n’est donc point celle d’Israël mais celle de l’Eternel qui ne cesse de veiller sur son peuple, son fils aîné (Ex. 4: 22). L’influence du message salvateur du Cantique de la Mer est si grande qu’il dépasse les limites de la Tradition juive. Ainsi, le chant «Wade in the Water», essentiellement inspiré du Cantique de la Mer, est adopté par Harriet Tubman. Harriet Tubman dénommée «la Moïse du peuple noir», courageuse militante en faveur des droits civiques et de l’abolition de l’esclavage afro-américain, adoptera ce chant[3] afin d’orienter les esclaves évadés dans leur fuite effrénée vers la Liberté.
Le Cantique de la Mer, hymne totalement consacré à la Gloire divine, constitue une louange profonde et sincère provenant d’un peuple souffrant qui, libéré de ses chaînes aliénantes, aspire à édifier une société fondée sur la justice, la paix et l’amour (Ex. 15: 17-18) où resplendirait le Royaume des Cieux sur terre, la terre de tous les hommes (Joël 3: 1-2).
[1] Exode 13: 17- 15: 26.
[2] Traité Méguila 10, b : «Alors que les anges s’apprêtaient à chanter la louange de l’Eternel, le Saint béni Soit-il rétorqua: » Les créatures, œuvre de mes mains, se noyent dans la Mer et vous aspirez à chanter ?! » »
[3] D’autres chants tirés du répertoire afro-américain s’inspirent de l’ouverture du Jourdain et de l’entrée d’Israël en Canaan: « Deep River« , « March down to Jordan« …
«Wade in the Water»
Si l’étude du TaNaKh vous fait rêver, n’hésitez pas à me joindre:
hebreubiblique@gmail.com
Au plaisir de vous retrouver,
Shabbat shalom!
Avec toutes mes amitiés,
Haïm Ouizemann
J’habite dans un petit village de 400 habitants.
Nous célébrons la résurrection du Christ la veille, au cours d’une veillée pascale. où nous célébrons dans un premier temps sa mort puis sa résurrection.
Lire ou écouter ce cantique de Moïse à la lueur des bougies de plus en plus nombreuses et lumineuses est quelque chose de magique.
Shalom Cathou, merci a toi ! Avec toutes mes sinceres amities, Haim
Shalom Raïm et tous.
Ce texte est une véritable leçon de vie. Aucun humain n’a le droit d’asservir ou de faire de l’humain son esclave, comme les égyptiens l’ont fait mais aussi les américains envers les africains. Tout cela sous peine d’encourir la colère de l’Eternel. Aussi, respecte-toi toi-même et tu pourras respecter ton prochain. La liberté est un droit humain voire Divin.Tous les êtres, quelque soit leur race; sont toutes des créatures d’ Adonay. Merci Haïm pour ce superbe texte que je découvre. L’hymne à la mer : titre merveilleux qui me laisse rêveuse par sa puissance, châtiment mais aussi Amour Divin .
Bernadette
Shalom bernadette! En effet, la Tora d’Israel enseigne a l’Humanite que nul etre ne detient le droit d’asservir son prochain. Ce message empreint d’universalite est encore d’actualite dans notre monde ou la barbarie semble parfois l’emporter. Mais ce cantique de la Mer nous apprend qu’il ne faut jamais desesperer! Toda a toi pour tes commentaires! Au plaisir de te retrouver. Avec toutes mes amities. Haim O.
Oui Raïm tu as raison, la barbarie est toujours présente actuellement. Les uns tentent encore d’imposer leur point de vue et leurs convictions religieuses aux autres. On n’est pas loin de perdre notre liberté si on ne se défend pas. Eux, n’hésitent pas à verser le sang des innocents. L’exploitation de Homme par l’Homme existe toujours, hélas.Et les plus nantis laissent mourir les démunis. On le voit avec les réfugiés.
Shalom Raïm et que l’Eternel veille sur toi et sur tous les gens bons et empathiques ainsi que ceux qui se conforment aux désirs du Seigneur.